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17 décembre 2010

Rapport Changement de vitesse : Cibler, non plus les soins de santé au Canada, mais un Canada en santé du Conseil canadien de la santé

Pamela Fralick, présidente et chef de la direction de l’Association canadienne des soins de santé.  


Sur l’étagère du haut de ma bibliothèque, à la maison, parmi de nombreuses autres vieilles choses se trouvent trois documents originaux abîmés par le temps – ce sont, en réalité, de précieux trésors pour moi. Il s’agit du rapport marquant intitulé A New Perspective on the Health of Canadians (Nouvelle perspective de la santé des Canadiens) qui date de 1974 et, de 1986, j’ai aussi l’Ottawa Charter (Charte d’Ottawa), puis l’incontournable F/P/T Agreement on Determinants of Health (en anglais seulement) signé à Victoria en 1994. J’ai maintenant en mains le rapport du Conseil canadien de la santé, Changement de vitesse. S’agira-t-il d’un rapport qui nous poussera précipitamment vers le point de bascule à partir duquel des mesures vont réellement voir le jour? 

Je revois un grand nombre de documents sur un large éventail de sujets « chauds » dans le secteur de la santé. La plupart sont des documents d’information bien présentés. Mais ce rapport a toutefois généré chez moi un vif enthousiasme – et ce n’est pas une qualité que l’on donne aisément à un ouvrage sérieux! 

Ce document réunit toutes les proclamations, présentes et passées, sur les déterminants de la santé. Il ne dégage aucune émotion, affiche un ton professionnel et est en même temps un véritable pavé dans la mare. Je pense par exemple à la déclaration du sénateur Wilbert Keon : « …increased expenditures on health care are likely impacting negatively on the general health of our population by virtue of diminished investments by other areas like education... » (« Des dépenses accrues en santé auront probablement des effets négatifs sur la santé générale de notre population, car elles diminueront les sommes disponibles pour des investissements dans d’autres secteurs comme l’éducation… »),  qui m’a franchement fait sursauter et m’a amenée à réaliser à quel point cette affirmation est vraie et à constater que nous avons fait bien peu sur le plan collectif.  

Et que dire de déclarations éloquentes telles que « ...our analysis confirms what the literature has already told us: research and analysis about health promotion and the determinants of health are not being translated into public policy and program action in Canada to the degree that was expected… » (« …notre analyse confirme ce que la documentation nous a déjà appris : la recherche et l’analyse sur la promotion et sur les déterminants de la santé ne se traduisent pas par des politiques publiques, ni par un programme d’action au Canada de la teneur à laquelle nous nous serions attendus… »); elles ont de quoi susciter des réactions elles aussi. Plus qu’un pavé, cette affirmation devrait créer un véritable raz-de-marée! 

Ce rapport est truffé de petits encadrés et de citations stimulantes tirés de tous les principaux rapports, de preuves et de données qui ne peuvent que nous convaincre « qu’il doit bien y avoir une utilité à tout cela ». Même la question difficile du rapport coûts-bénéfices est abordée, permettant au lecteur de comprendre les progrès accomplis et les questions qui demeurent en suspens.

Comment se fait-il, alors, que même si nous savons autant de choses, les efforts pour modifier notre approche aient été aussi relativement futiles? 

Le Conseil canadien de la santé a fait appel au concept des « méchants problèmes ». C’est vrai. Mais malheureusement, le Conseil n’utilise pas ce prétexte pour nous décharger de nos responsabilités; on nous donne une piste pour passer à l’action. Ainsi, le rapport identifie les organismes existants qui, à son avis, sont bien positionnés pour diriger les mesures entreprises. Le Conseil propose aussi une approche pangouvernementale et la juge nécessaire pour le changement ou la réussite, et cite la déclaration de septembre 2010 des ministres de la Santé du pays comme raison de son optimisme.

Or, cette déclaration parle beaucoup de prévention et de promotion, mais peu des déterminants de la santé et est encore trop récente pour être considérée comme efficace en termes d’action concrète.

Au bout du compte, même s’il nous fait presque toucher des recommandations de « prochaines étapes », ce rapport nous laisse sur notre faim en raison de son manque d’orientations pour l’avenir. Compte tenu des défis et des échecs des décennies passées, peut-être était-ce là de trop grandes attentes. Le plus important message à retenir de ce document est peut-être aussi le fait que nous devons trouver quel est notre rôle à titre d’agents de changement, et agir en conséquence. Maintenant. 

De notre côté, nous de l’ACS avons récemment approuvé un nouveau plan en six points pour nos efforts de sensibilisation des prochaines années. Plusieurs de ces points feront appel à une approche par déterminants de la santé, particulièrement dans le secteur d’intérêt que représente la prévention des maladies et la promotion de la santé. Nous pouvons aussi faire plus pour faire passer notre travail de la santé et des soins de santé uniquement aux déterminants de la santé. Et nous devons le faire. 

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Mme Pamela C. Fralick est présidente et chef de la direction de l’Association canadienne des soins de santé. Elle est aussi coprésidente du Groupe d’intervention Action Santé (HEAL), une coalition de 37 associations et organismes nationaux du secteur de la santé, coprésidente de la coalition canadienne pour la santé publique au 21e siècle et présidente de la Coalition pour la qualité de vie au travail et des soins de santé de qualité.  

Mots Clés: Promotion de la santé

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